Mende (Languedoc) , exposition personnelle à la galerie municipale

C'est toujours la même vieille terre qui nous entoure, la même lumière, le même ciel aux nuages changeants, les mêmes feuillages innombrables. Quelque chose de la nature immémoriale demeure, en parallèle avec notre modernité galopante. Pourquoi ne pas continuer à la peindre, comme l'ont fait les grands paysagistes de Giorgione à Van Gogh ? C'est ce que semble dire Christine Sastourné à travers sa production récente. Mais nul passéisme dans sa démarche, nulle illusion d'un monde préservé. Cela tient d'abord à la technique de la peinture acrylique, à la simplicité festive des couleurs. Mais plus encore au regard du peintre qui accepte, avec amusement dirait-on, les éléments d'urbanisme qui balisent le paysage d'aujourd'hui : l'automobile avec son asphalte, ses bandes blanches et ses panneaux routiers ? les sacs plastiques et les containers à ordures ; les silhouettes au loin d'un port industriel, les traces sur la plage du tracteur-nettoyeur. Même les baigneurs, délaissant la nudité antique, trahissent la société des loisirs par le port du maillot 100% polyamide. Si donc Christine Sastoumé revient bien à cette démarche classique qui consiste à représenter ce que l'on voit, lé monde qu'elle nous montre, même éloigné des villes, n'est plus celui de Ruysdael ni de Constable. Il est le nôtre, et cette exposition en trace un portrait réconcilié, où les marques indiscrètes de l'industrie humaine entrent en dialogue avec la beauté de la nature.

Les mendois qui se souviennent avoir vu en 1993 à la Maison Consulaire les colonnes exposées par Christine Sastourné seront peut-être surpris de la retrouver aujourd'hui en paysagiste, plus classique en apparence. Pourtant, les colonnes couvertes de personnages peints faisaient suite à une série de sujets mythologiques, et précédaient un travail sur le portrait. Plus tard, Christine Sastourné s'est intéressée à la nature morte, et maintenant au paysage. Il y a donc chez elle une référence constante aux grands genres de l'histoire de la peinture, mais qui passe toujours par le filtre d'un regard contemporain. Il s'agit d'une retraduction toute personnelle, autobiographique et moderne.